ERWAN FROTIN

05.02.2022
24.04.2022

RÉTROVISION

Depuis près de vingt ans, Erwan Frotin engage ses recherches photographiques autour des formes végétales, minérales et animales tout en enchaînant avec succès commandes publicitaires et éditoriales. Diplômé de l’ECAL en 2002, école où il a influencé plusieurs volées d’étudiant·e·x·s  par ses enseignements, Frotin s’est fait un nom sur la scène internationale, notamment par ses natures mortes. Les fleurs sauvages qu’il immortalise dans une palette de couleurs chatoyantes ne sont pas sans rappeler les herbiers réalisés un siècle plus tôt par le photographe allemand Karl Blossfeldt. Avec ses photographies de plantes sur fond neutre, Frotin s’inscrit en effet dans l’héritage du célèbre photographe de la Nouvelle Objectivité rendu célèbre grâce au livre Le Jardin merveilleux de la nature (1932). Développant une œuvre qui navigue entre le réel et le surréel, Frotin photographie à la chambre un répertoire de formes végétales, animales et minérales d’une beauté saisissante. En complément à ses natures mortes minutieusement composées et réalisées en studio, le photographe poursuit ses explorations du monde naturel en voyageant à travers le monde, au Japon, à Hawaii, au Chili, au Costa Rica, et en Inde. Artiste ayant développé une écriture photographique singulière, Frotin crée des images dans des endroits sauvages, lieux paradisiaques qui semblent hors du temps et sans présence humaine. Au fil des ans, l’artiste compose un cabinet de curiosités à l’ambition quasi encyclopédique. Cet intérêt porté à la nature le relie au poète et philosophe américain du début du 19e siècle Ralph Waldo Emerson qui voyait en elle une entité divine, et à l’Américain Eliot Porter, pionnier de la photographie couleur, qui luttait pour la protection de l’environnement en immortalisant la beauté et la diversité du monde naturel. Frotin nous invite à nous reconnecter avec le cosmos en nous laissant porter et transformer par ces fragments issus de territoires inconnus. L’univers dépeint avec poésie par l’artiste offre une vision peu conventionnelle de la nature et des êtres qui l’habitent. Car même lorsqu’il s’agit de dépeindre les humains, ceux-ci sont hybrides comme les plantes. Par son travail, l’artiste souhaite montrer la fluidité omniprésente du vivant.

À l’invitation du MBAL, Frotin fait dialoguer son catalogue de formes sur les murs du musée. Sous son regard, plantes, animaux, minéraux, paysages et humains se retrouvent interconnectés. Fasciné par la beauté de la nature, Frotin crée des photographies d’un monde étrange et surnaturel, en constante métamorphose. Rétrovision désigne la capacité à porter le regard sur le passé et les origines de la Terre. Or ici les images, ancrées dans une réalité protéiforme, évoquent paradoxalement un décor de science-fiction. La notion de lieu et de temps nous échappe complètement incitant notre imaginaire à nous laisser embarquer dans des territoires inexplorés similaires à ceux qui habitent l’inconscient. Il y a une idée de sacré dans le travail de Frotin. Ce flux d’images hypnotiques est une vraie invitation à la méditation.

Un livre, intitulé FLUX 1, publié par Note Note Editions paraît à l’occasion de l’exposition. Né à Toulon, Erwan Frotin (Suisse/France, 1978) a reçu un diplôme de photographe de l’ECAL/École cantonale d’art de Lausanne en 2002, ainsi qu’une formation en biologie et en histoire de l’art. La même année, il remporte le Grand Prix de la photographie au Festival de Hyères, qui a été rapidement suivi par sa première commande pour Vogue Paris. Dès lors Frotin enchaîne les commandes, notamment pour les magazines Vogue Hommes International, Wallpaper, The New York Times Magazine, Another Magazine, Interview, System, et Dazed and Confused. Il crée également des campagnes pour Asprey, Dior, Bergdorf Goodman, Louis Vuitton, Tsumori Chisato, Loewe et Apple. Son travail a remporté de nombreux prix et a fait l’objet d’expositions en Suisse, en France, en Italie et aux États-Unis.